LE FAMEUX JOHN SINGER SARGENT!

Lady Agnew of Lochnaw (1893)

Aussi célèbre que ses modèles, l’artiste américain John Singer Sargent, né en 1856 et mort en 1925, a réalisé plus de 900 toiles et 2000 aquarelles sans compter ses nombreux croquis et dessins. Proche des artistes Claude Monet, Paul Helleu, Albert Besnard, Gabriel Fauré, Edgar Degas, Auguste Rodin ou encore Edmund Gosse, le peintre virtuose s’inspire des plus grands : Vélasquez, Van Dyck ou encore Gainsborough. Retraçons le périple de cet artiste cosmopolite, portraitiste classique de la haute société internationale et aquarelliste de talent.

UN AMÉRICAIN À PARIS

Bien qu’il soit de nationalité américaine, John Singer Sargent est né à Florence (Italie). Ses parents, issue d’une famille coloniale ancienne d’Amérique, décide de mener une vie itinérante suite au décès prématuré de sa sœur aînée, deux ans avant sa naissance. Son père, médecin, quitte son poste de chirurgien ophtalmique à Philadelphie et la famille s’expatrie en Europe. Les Sargent ne cesseront de voyager.  Ce mode de vie permettra à l’artiste de s’instruire sur le terrain, entre excursions et visites. Il parlait d’ailleurs plusieurs langues couramment.

D’un point de vue artistique, les paysages et les œuvres rencontrés, lui ont permis de développer sa passion pour le dessin, transmise et encouragée par ses proches : son père était un illustrateur médical qualifié et sa mère une artiste amateur talentueuse. A 13 ans, il prendra des cours d’aquarelle. Il rentrera par la suite à l’Académie de Florence puis à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris de 1874 à 1878. Pour parfaire son éducation artistique, il fréquente les ateliers et les musées parisiens.

Tout au long de sa vie, l’artiste conservera ce goût pour l’aventure et les voyages. La beauté et la diversité du monde seront ses principales sources d’inspiration.

PORTRAITISTE DE LA HAUTE SOCIÉTÉ

Travailleur acharné et très talentueux, Sargent devient très vite populaire au sein du milieu de l’art. A la fin de ses études, Sargent peint en 1879, le portrait de son maître Carolus-Duran (image à droit). L’œuvre sera exposée au Salon de Paris et connaîtra un vif succès. Sa carrière de portraitiste est lancée !

Portrait d’August Rodin (1884) 

La haute société de l’époque va se presser à son atelier pour obtenir un portrait signé Sargent, certains venants même des Etats-Unis pour cela. L’artiste en homme d’affaires avisé, menait les négociations lui-même. Il n’avait d’ailleurs pas d’assistant, c’est donc lui qui s’occupait également de la préparation des toiles et des expéditions de commandes, entre autres. Il se rend ensuite sur place pour voir où sera accroché le tableau et choisit parmi la garde-robe du client, la tenue adéquate. La mise en scène est choisie pour mettre au maximum en valeur les riches commanditaires, cherchant à révéler leur personnalité.

Le travail sera réalisé au domicile du client ou dans son atelier, nécessitant entre 8 et 10 séances de poses. Il peint généralement directement à l’huile, sans esquisse. L’artiste est connu pour faire la conversation pendant les séances de pose. Il réalise ainsi le portrait de nombreuses célébrités, hommes et femmes, riches ou puissants tels que Théodore Roosevelt, Auguste Rodin, …

L’artiste croulant sous les commandes, réalise aussi des esquisses au fusain qu’il appelle « mugs ».

Croquis « mug » de Mrs. George Swinton

 Jusqu’alors tout lui sourit. C’est sans compter sur son obsession pour la femme d’un certain banquier parisien Pierre Gaudreau, une figure de la bonne société parisienne de l’époque : Virginie Gaudreau, connue aujourd’hui sous le nom de Madame X, titre de l’œuvre réalisée par Sargent en 1884.

Cette œuvre n’a pas été commandé, c’est Sargent lui-même qui a dû courir après cette grande dame pour obtenir qu’elle pose pour lui.
Sargent a eu raison d’insister car il s’agit d’une de ces meilleures œuvres, seulement il a dû en payer le prix. En effet, présentée au Salon des Artistes Français de 1884, l’œuvre lui attirera les foudres du public : l’œuvre est jugée trop érotique, même en relevant la bretelle qui tombait de son épaule, rien n’y fait. Il faut dire que ce port de tête, ce fort contraste entre la peau blanche du modèle et la robe de satin noir, l’influence de Manet et des estampes japonaises sont bien trop scandaleux pour la critique académique de l’époque.

Blessé, Sargent envisage d’abandonner la peinture mais finit par s’installer à Londres pour le reste de sa vie.
Avec le temps, il connaîtra à nouveau le succès dans la capitale anglaise. A l’apogée de sa carrière en 1900, il décidera de fermer officiellement son atelier en 1907.

SARGENT, L’AQUARELLISTE DE TALENT

Officiellement, oui, Sargent est un jeune retraité de 51 ans. Seulement, les critiques à propos du portrait de Madame Gaudreau ont profondément bouleversé sa carrière, le poussant à cacher ces œuvres les plus audacieuses aux yeux du grand public.

Malgré tout, les portraits de Sargent ont toujours été appréciés pour leur qualité, on peut seulement regretter qu’ils soient un peu trop convenus. D’ailleurs, l’artiste n’a pu s’empêcher de donner forme à ses envies créatives notamment lors de ses nombreux voyages. N’oublions pas que Sargent n’a cessé de parcourir le monde !

Quelle autre technique serait plus pratique pour saisir le moment présent pendant ses voyages que l’aquarelle ?

C’est ainsi, qu’au début du 20e siècle, l’artiste, las du portrait, peint plus de 2000 aquarelles de la campagne anglaise au Moyen-Orient, en passant par Venise, Cordoue ou encore le Tyrol, représentant, plein de spontanéité et de fraîcheur, ses thèmes de prédilection :  la nature, l’architecture, l’exotisme. La figure humaine n’est malgré tout jamais très loin. Il voyage d’ailleurs souvent avec des amis qui lui serviront de modèles.

Son travail à l’aquarelle a été reconnue de son vivant comme le montre le succès des expositions de 1905 à Londres et 1909 à New York.

A l’époque des avant-gardes artistiques et au regard de ses aquarelles légères, il est tentant de classer Sargent comme un impressionniste. Pourtant il ne faut pas s’y tromper, la peinture de Sargent reste bien engagée avec son temps. Il reste un gentleman de la haute société et c’est ce monde qu’il montre et documenté dans ses œuvres.

En conclusion, John Singer Sargent a eu la chance d’être un artiste reconnu dès les débuts de sa carrière, seule l’affaire du tableau Madame X entacha quelque peu sa réputation. Malgré l’effervescence artistique de son époque, Sargent est resté en dehors des mouvements artistiques. À la fin de sa vie, les avant-gardes lui feront tout de même de l’ombre et il y restera quelque temps. Son œuvre sera finalement redécouverte dans les années 1960, notamment par le biais d’Andy Warhol. Aujourd’hui ses œuvres sont visibles dans des dizaines de musées à travers le monde dont le Musée d’Orsay à Paris.

Article écrit par Maïté Sanogo, professeur d’Art Plastique à Créteil.

Sources :

https://fr.wikipedia.org/wiki/John_Singer_Sargent#cite_note-Olson910-5

https://www.philomag.com/blogs/chronique-transatlantique/john-singer-sargent-lambition-assouvie-qui-se-reveille

https://www.apprendre-a-dessiner.org/john-singer-sargent-litinerant/

https://www.rivagedeboheme.fr/pages/arts/peinture-19e-siecle/john-singer-sargent.html